26 mai 2025
Article
Dans un marché du reconditionné en pleine croissance, la TVA sur marge reste un mécanisme fiscal peu connu, mais central. Conçu pour éviter une double imposition sur les produits d’occasion, ce régime soutient l’économie circulaire locale lorsqu’il est correctement appliqué.
À travers cet article, Recommerce propose un éclairage pédagogique sur les règles, les risques et les bonnes pratiques autour de ce régime clé.
La TVA sur marge : qu’est que c’est ?
La TVA sur marge est un régime fiscal spécifique instauré au niveau européen par la directive 2006/112/CE. Il s’applique aux biens d’occasion, avec pour objectif d’éviter une double taxation sur des produits ayant déjà été soumis à la TVA lors de leur première mise sur le marché. La TVA sur marge s’applique uniquement sur la marge réalisée par le revendeur, soit la différence entre le prix d’achat et le prix de revente.
Par exemple, si un smartphone est racheté à 120€ et revendu reconditionné à 200€, la TVA ne s’applique que sur une assiette de 80€. A un taux standard de 20%, cela revient à une TVA effective de 16€, soit 8% du prix final.
Ce mécanisme, déjà utilisé dans des secteurs comme l’immobilier, l’automobile d’occasion ou les enseignes spécialisées, est un levier fiscal clé pour structurer une économie circulaire locale et durable, car :
il incite les professionnels à racheter localement auprès de particuliers et ainsi soutenir leur pouvoir d’achat ;
il favorise la traçabilité des flux (factures, origine du produit, numéro IMEI…), notamment en cas de contrôle fiscal ;
il assure une équité fiscale tout en encourageant le réemploi.
Les conditions d’application de la TVA sur marge
Il est essentiel de rappeler que la TVA sur marge n’est pas automatique. Pour pouvoir l’appliquer, plusieurs conditions doivent être réunies :
Le produit doit avoir été acheté à un particulier ou à un acteur non assujetti à la TVA ;
Le produit doit avoir été acquis dans l’Union européenne ;
Le produit doit pouvoir être tracé (origine, numéro IMEI, facture d’achat) notamment en cas de contrôle
À défaut de réunir ces conditions, le produit doit alors être soumis au régime classique de TVA sur le prix total.
Exemple :
Éligible à la TVA sur Marge : un smartphone racheté à un particulier français via un programme de reprise opéré par un opérateur ou entreprise, puis reconditionné et revendu en Allemagne.
Non éligible à la TVA sur Marge : un téléphone acheté à un fournisseur hors Europe puis revendu à un particulier au sein de l’Union européenne.

Le phénomène de la Fraude à la TVA
Si le régime de la TVA sur marge est un régime vertueux par essence, son application incorrecte génère des dérives importantes. Dans un contexte de forte croissance du marché du reconditionné et de forte pression sur les prix, certains acteurs contournent les règles fiscales, créant une distorsion de concurrence qui pénalise les entreprises respectueuses du cadre légal.
Des produits importés depuis des pays tiers (hors UE) revendus sous régime TVA sur marge, alors qu'ils devraient être soumis à la TVA classique afin de payer moins de TVA
Des pratiques de “Dumping” avec des prix agressifs très bas qui ne reflètent pas les charges réelles d’un reconditionneur local et respectueux de la réglementation
Un impact grave sur le marché et les acteurs locaux et vertueux
Ces dérives ont un impact économique et concurrentiel réel :
Les acteurs en conformité se retrouvent désavantagés face à des offres agressives, rendus possibles par des économies de fiscalités non conformes ;
Les consommateurs finaux perdent confiance, face à des écarts de prix difficilement compréhensibles, et parfois à des produits non conformes ;
L’image globale du secteur peut être ternie.
À titre d’exemple, la fraude à la TVA représente une perte de plus de 90 milliards d’euros par an pour les États membres de l’UE. Dans le secteur du reconditionné, l’EPPO a révélé en 2024 une fraude à la TVA sur marge de 19 millions d’euros impliquant un seul acteur, répartie sur six pays européens.
Encadrer les pratiques pour sécuriser le régime de la TVA sur marge
Ce que doivent vérifier les acheteurs, marketplaces et enseignes
Pour limiter les risques et garantir des achats conformes, les différents acteurs de la chaîne ont un rôle à jouer, notamment lorsque les prix proposés semblent très bas.Voici les vérifications essentielles :
Vérification de l’origine du produit : le produit doit provenir d’un particulier ou d’un acteur non assujetti à la TVA dans l’UE. Un téléphone importé des États-Unis ou de Chine ne peut pas bénéficier du régime de TVA sur marge.
Présence d’un marquage CE : c’est une exigence réglementaire, mais aussi un indice de conformité et de provenance européenne.
Facture d’achat initiale : elle permet de tracer le premier point de revente et de vérifier que la TVA n’a pas déjà été appliquée.
Numéro IMEI ou numéro de série : essentiel pour identifier l’appareil de manière unique et éviter les fraudes croisées.
Mention claire du régime de TVA appliqué sur la facture de revente : que ce soit TVA sur marge ou TVA classique, cela doit apparaître de manière explicite.
Pourquoi la traçabilité est essentielle ?
Face aux dérives observées, la traçabilité des produits s’impose comme un outil indispensable pour garantir une application correcte du régime de TVA sur marge.
Plus qu’un outil de conformité, elle devient une réponse concrète aux enjeux de concurrence déloyale, de transparence pour le consommateur et de fiabilité des acteurs.
Elle fournit les éléments nécessaires pour :
attester de l’origine du bien (Union européenne ou hors UE),
documenter les étapes du processus de reprise et de reconditionnement,
démontrer que les conditions d’éligibilité à la TVA sur marge sont bien réunies.
Elle constitue également une protection pour les acheteurs et les distributeurs, notamment en cas de contrôle fiscal ou de litige avec le consommateur.
Les bonnes pratiques du secteur
Pour sécuriser le secteur, des standards communs commencent à s’imposer, portés par des acteurs engagés. Parmi les bonnes pratiques :
fournir des factures complètes à chaque étape de la chaîne (reprise, reconditionnement, revente),
Structurer les bases de données produits autour de numéros uniques (IMEI, numéro de série),
Automatiser la déclaration de régime fiscal dans les systèmes d’information,
Former les équipes commerciales et achat à la reconnaissance des conditions d’éligibilité.
Vers un marché plus sain : le rôle des acteurs engagés
Dans un marché en pleine structuration, les entreprises qui respectent les règles fiscales et investissent dans la transparence jouent un rôle essentiel dans la professionnalisation du secteur.
C’est dans cette logique que s’inscrit Recommerce, en tant qu’acteur historique du reconditionnement en France et en Europe.
Recommerce : expertise, conformité et exemplarité
Pionnier du reconditionné en France et en Europe, Recommerce applique avec rigueur le régime de la TVA sur marge, dans le strict respect de ses conditions légales d’éligibilité. L’ensemble du processus de reprise, de reconditionnement et de revente est structuré pour garantir une parfaite traçabilité. Chaque produit est associé à une identité unique (numéro IMEI, facture d’origine, statut TVA), et les flux sont documentés à chaque étape.
Recommerce s’appuie également sur une chaîne de reconditionnement opérée avec des partenaires certifiés, respectant les normes les plus exigeantes du secteur (ISO 9001, ISO 14001, ISO 27001, Label RECQ). À travers cette exigence de conformité et de transparence, l’entreprise protège non seulement ses clients, mais contribue à élever les standards du marché.
Un rôle d’éducateur du marché
Au-delà de sa propre pratique, Recommerce s’engage activement dans la pédagogie et l’accompagnement du secteur. Face à un régime fiscal aussi spécifique que la TVA sur marge, souvent mal comprise ou mal appliquée, il est essentiel de partager les bonnes pratiques.
Pour aider les acteurs à mieux comprendre les obligations légales dans le secteur du reconditionnement, Recommerce Group, en collaboration avec CMS Francis Lefebvre, a publié son Guide juridique du reconditionnement, que vous pouvez retrouver sur notre site.
La TVA sur marge, lorsqu’elle est correctement appliquée, est un outil puissant au service de la circularité, de la compétitivité locale et de la justice fiscale. Mais elle suppose un haut niveau de maîtrise et de transparence, que tous les acteurs de la chaîne de valeur : fournisseurs, reconditionneurs, distributeurs et plateformes de revente doivent garantir.